Ces dernières semaines, j’ai reçu de nombreux messages sur les tensions financières auxquelles nous pouvions nous attendre à partir de mi-février. En effet, les tensions sur les marchés actions sont pour l’heure inexistantes. Néanmoins, il semblerait que des tensions assez puissantes se dégagent sur le marché obligataire. Économiquement, le marché obligataire reste à surveiller et déterminera très certainement l’orientation des principaux actifs.
Réajustements puissants sur les taux.
Dans mon rapport prévisionnel et mon interview d’octobre, je suis revenu sur le risque habituel de réajustement taux réel/croissance. Réajustement qui traduit inévitablement une hausse des taux quand la récession touche à son terme. Nous en sommes à ce point précis aujourd’hui. La reprise économique implique des besoins de liquidités plus grands pour (1) rester solvable face aux dettes et pertes accumulées et (2) investir et consommer à nouveau. Les périodes d’avant crise et les périodes de reprise économique (post-crise), surtout si elles sont contrastées, sont aussi des périodes à risques élevés sur les liquidités.
Au 4e trimestre 2020, la productivité américaine a chuté de 4,8%, ce qui est inédit depuis au moins 2008. C’est également un phénomène à penchant inflationniste. Si à cela on ajoute la hausse du prix des matières premières (voir mon article de l’automne 2020 à ce sujet), et le maintien des restrictions sanitaires, cela résulte dans des anticipations inflationnistes.
La vision sur obligations reste inchangée : un fort risque global devrait se maintenir jusqu’au printemps 2022. La reprise économique ne fait que commencer, et l’Europe devrait suivre la même tendance que les États-Unis. Un risque budgétaire devrait donc persister de l’automne 2021 au printemps 2022, surtout dans certains États européens présentant des déficits très hautement structurels.
Ces dernières semaines, les taux souverains subissent une hausse graduelle, et se rapprochent des niveaux d’avant crise. À noter que la soutenabilité de la dette équivaudrait à celle de la situation pré-COVID si les taux souverains resteraient 16% à 20% sous les niveaux d’avant crise. Ce qui correspond aussi aux niveaux actuels. Une continuité de la hausse des taux n’aurait donc plus comme explication la reprise économique, mais des risques d’insolvabilités. Ce qui est dangereux.
Les marchés actions plafonnent.
Ainsi, une continuité de la hausse des taux pourrait remettre en question le calme économique, surtout en Europe. À l’inverse, une stagnation des taux souverains serait, dans le contexte actuel, un signal probable de hausse du risque sur actions.
Les anticipations sur actions sont celles de la présence d’un risque correctif jusqu’au début du printemps 2020, pour les raisons que nous connaissons maintenant (jusqu’à avril). La prochaine période sensible sur actions pourrait se manifester à l’été, suivi des obligations une fois ce risque correctif passé.
Enfin, comparé à la base monétaire, les marchés boursiers ont même perdu une faible partie de leur valorisation pré-COVID. En effet, le ratio Dow Jones/Base Monétaire M2 (USA) est à 1,6 en février 2021 (contre 2,4 en 2000 ; 1,8 en 2007 ; et 1,8 fin 2018). Les marchés subissent aujourd’hui un phénomène de plafonnement monétaire, ce qui peut traduire une amputation des performances à long terme (plus de 5 ans).
L’or plafonne, et les cryptomonnaies s’envolent…
Fondamentalement, on ne pourra que répéter que les cryptomonnaies sont corrélées au stress financier. Le fait que le stress financier reste particulièrement faible ces dernières semaines provoque une hausse accrue du cours des cryptomonnaies. Le marché des cryptomonnaies vient d’atteindre les 1 500 milliards de capitalisation, ce qui est considérable. À noter que cette hausse a été permise en quasi-totalité par les institutionnels. L’impact des particuliers reste faible.
La vision actuelle sur les cryptomonnaies est que la tendance à long terme devrait conduire à une hausse marquée du nombre d’utilisateurs ainsi que de la capitalisation globale. Par ailleurs, l’augmentation de l’influence des institutionnels ces derniers mois empêche un effondrement complet du marché. En effet, les baleines (plus de 1000BTC) pèsent 33% de l’offre de Bitcoin. Bitcoin qui représente lui-même 60% du marché des cryptomonnaies (75% si l’on ajoute ETH). Néanmoins, les principales cryptomonnaies restent surachetées en ce moment. Un signal de correction clair apparaîtrait dans le cas d’une hausse du stress financier. La technique du pyramidage selon le stress financier reste statistiquement une méthode d’appoint.
Concernant l’or physique, le cours tend à plafonner. Après son point bas de décembre 2020 sous les 1800$ l’once, l’or subit le même phénomène qu’en 2008 ou 2011 : la variation des taux réels et la reprise du dollar. La hausse des taux provoque sur l’or un impact négatif. L’impact négatif de la hausse des taux est à ce jour compensée par la reprise inflationniste, ce qui provoque une stagnation globale.
Là encore, la perspective sur l’or est que la majorité de la phase haussière de long terme s’est écoulée (2018-2023). L’or devrait rester globalement fort jusqu’en 2023 environ même si des risques correctifs apparaîtront entre temps (évolution de l’inflation et des taux en particulier). L’or est un actif fondamentalement fiable et éternellement économique. À ce sujet, voici mon article de présentation de mon dernier livre sur l’or et l’argent ainsi que mon rapport prévisionnel sur l’économie des 15 prochaines années :
En bref, les réajustements économiques anticipés se confirment, sans impact puissant sur les actions pour l’heure. De plus, les obligations devraient rester fondamentalement défavorisées. Concernant les cryptomonnaies, le principal risque serait celui d’une contagion des tensions depuis les marchés actions. Enfin, l’or bénéficierait d’une hausse dans le cas d’une continuité inflationniste, même si l’évolution des taux permet de supposer une variabilité moindre.
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Thomas Andrieu |Écrivain et rédacteur à Cafedelabourse, Thecointribune, le fonds RocheGrup, Youtrading, JDHÉditions, Les Pros de l’Éco, Boursikoter.
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